Le Dopage Sportif: Biologie et Produits

En prémisse de cet article sur les produits dopants, il serait bon que vous visionniez le podcast sur le dopage fait avec Sean (en particulier la seconde partie sur l’endocrinologie) ainsi que l’article associé car je vais prendre certaines connaissances du système hormonal comme acquises. Voici le lien vers le podcast :

Je vais vous décevoir, je ne vais pas parler de tous les produits dopants existants, car cela serait beaucoup trop long (il faudrait des milliers de pages) et plus simplement je ne les connais pas tous. Ci-dessous, je vais détailler quelques produits choisis en vous racontant pourquoi ils ont été inventé, comment ils ont été détourné, les recommandations initiales, ce qui recommandent les sites marchants, les effets secondaires et parfois en exemple un athlète pris par la patrouille anti-dopage. Let’s go !

Le Dianabol

Histoire

De son véritable nom : Stéroïde Méthandrosténolone. On doit sa propagation et sa popularité dans le milieu sportif à John Bosley Ziegler, médecin américain et haltérophile amateur dans les années 50. Il se lit d’amitié avec de nombreux bodybuilders de l’époque, comme John Grimek ou le célèbre créateur de Monsieur Olympia : Joe Weider. Mais n’allez pas croire que ce sont les Américains les pionniers du dopage moderne, c’est plus compliqué que ça.

John Bosley Ziegler

En allant voir les championnats du monde l’haltérophilie en Autriche en 1954 et impressionné par la stature physique des athlètes russes, Ziegler discute autour d’une boisson alcoolisée avec le médecin de l’équipe de l’URSS.

Ce dernier, rond comme une bille, lui fait l’aveu de l’utilisation massive de testostérone. De retour au pays, Ziegler cherche à reproduire la même chose mais échoue. Finalement, il arrive à synthétiser de la méthandrosténolone grâce au laboratoire CIBA et la molécule sera commercialisé en 1958.

Trofim Lomakin champion olympique en 1952. 1m67 pour 82-89kg. Sous testostérone.

Le Dianabol était utilisé pour accélérer la régénération tissulaire après de grave brûlure ou bien pour “booster” la vitalité des personnes âgées. Ce dernier point est d’ailleurs crucial pour comprendre la différence de culture entre les USA et la France dans les thérapies de remplacement de la testostérone aujourd’hui (la fameuse TRT).

Les Américains ont inventé le concept, donc aujourd’hui, un médecin américain n’aura pas de mal à prescrire ce genre de produit pour des personnes âgées car c’est culturellement ancré dans le pays. En France, un médecin de campagne n’aura aucun de mal à vous prescrire un peu de vin rouge pour les polyphénols et un anti-dépresseur. On choisi ses amis, pas son pays…

Ziegler fait profiter de sa découverte à ses amis bodybuilders du célèbre club de York Barbell et leurs physiques explosent. A l’époque, ils attribuent leurs résultats à une nouvelle méthode d’entraînement, basé sur la contraction isométrique. Les mensonges d’hier sont les mêmes qu’aujourd’hui.

Mais aujourd’hui, Instagram et les réseaux vendent mieux les nouveaux concepts bullshit des charlatants bodybuildé et des influenceurs Fake Natty (qui font croire qu’ils ne prennent rien alors qu’ils sont chargés comme des Poneys). Aux USA, il y a Mike O’Hearn, V-Shred, Liver King, Theresa Ivancik, Simeon Panda etc…

Liver King, Mike O'Hearn, Theresa Ivancik

Ziegler donnera du Dianabol à toute l’équipe nationale américaine aux JO de Rome de 1960 mais les soviétiques gagneront malgré tout. En effet, Ziegler est médecin et il prescrit la substance à des doses très basses mais les athlètes en consommaient toujours plus et Ziegler devient malgré lui le père des stéroïdes dans le sport américain.

Horrifié par le constat chez les athlètes de prostates élargies, de testicules atrophiées et de foie détruit, il se détache du York Barbell Club en 1967 et restera dans la honte et le regret jusqu’à la fin de ses jours pour avoir contribué malgré lui à détruire la santé d’athlètes dont le seul but initial étaient de performer.

Arnold Schwarzenegger a rendu célèbre le Dianabol en devenant l’icône du culturisme. Lui et d’autre ont associé la substance au terme “Breakfast of Champions” soit le petit déjeuné des champions. Ironiquement, l’expression a été réutilisé par de nombreuses marques de céréales industrielles pour le petit-déjeuné des enfants dans les années 90 et 2000. Avec les pubs et Arnold, le public s’est rentré dans la tête qu’il existait des petits-déjeuners pour les “vainqueurs” alors qu’il n’y a pas de Dianabol dans les Chocapics.

Arnold Schwarzenegger

Biologie et effets secondaires

Le Dianabol a la particularité de retenir l’azote. Or, on trouve de l’azote dans les protéines que l’on mange. En retenant l’azote, le corps stimule plus d’insuline, ce qui incite à capter à dépenser les glucides. En fin de chaîne métabolique, c’est la synthèse protéique et donc la prise de masse musculaire, qui est améliorée.

La posologie d’origine était de 10mg/jour maximum, ce qui permet de plus que doubler la quantité de stéroïde dans le corps d’un homme adulte (qui en produit naturellement 5-7mg par jour en moyenne). A l’époque, Ziegler ne savait pas que la prise de stéroïde exogène amènerait le corps des athlètes à ne plus en produire naturellement.

Pour rappel, la testostérone et ses dérivés sont produits dans les surrénales à hauteur de 10-15% et dans les testicules à hauteur de 85-90%. Si les cellules responsables de la production de testostérone ne reçoivent pas de signaux de la part de l’hypophyse pour fabriquer la molécule, les testicules vont arrêter d’en fabriquer et vont s’atrophier puisque les cellules en question ne fonctionnent plus.

Or, avec une prise oral de stéroïdes, les glandes de l’hypophyse reçoivent comme signal de rétro-action de ne plus demander la fabrication de testostérone (puisqu’il en existe déjà qui circule dans le sang).

A ceci s’ajoute une augmentation de la pression sanguine car le Dianabol va faire baisser la production de globules rouges, ce qui peut amener à des risques de crises cardiaques. Ensuite, la molécule est fortement hépatotoxique, ce qui signifie que le foie subira des dégâts irréversibles avec une prise prolongée. Ce n’est pas fini, le Dianabol est facilement aromatisé par la voie métabolique de diversification (aromatase) de votre corps, ce qui conduit à une production excessif d’œstrogène et donc à de la gynécomastie.

Au delà de l’acné et des pertes de cheveux probable, il fait chuter considérablement le HDL, le transporteur du cholestérol qui est censé ramener le cholestérol excédentaire des tissus vers le foie, ce qui à la longue peut provoquer des plaques d’athérome. Youpi.

Les sites marchands ont des recommandations basés sur les effets espérés potentiels concernant la prise de masse musculaire et non sur les effets secondaires. Là où Ziegler prescrivait (sans connaître tous les effets) 10mg/jour, les sites marchands recommandent des cures de quelques semaines à hauteur de 10-50mg/jours avec une limite supérieure à 100-200mg/jour avec parfois des phrases commerciales aberrantes :

« Moins toxique que la conso journalière d’alcool. »

« N’a jamais tué personne. »

Référence geek à Boromir
It is Foly” Boromir, The Lord of the Ring

Parabolon

Histoire

Stéroïde anabolisant estérifié de la tristement célèbre Trenbolone. Ce chapitre sera plus court que le précédent. Pas d’histoire rocambolesque entre USA et URSS, mais plus simplement des éleveurs de bovins dans les années 60 qui font appelle à des vétérinaires pour que les vaches développent beaucoup plus de viande tout en diminuant leur masse grasse, et donc des morceaux plus gros à manger, donc plus d’argent.

Bovin sous Trenbolon

Bien entendu, des bodybuilders vont essayer dans les années 80-90 et se rendent compte que la substance est au moins 5 fois plus puissante que la testostérone classique. Les athlètes se fournissent auprès d’un laboratoire français (cocorico ?), le labo Roussel Uclaf qui produisait la substance en grande quantité et la vendait sous forme injectable. L’un des bodybuilders les plus célèbres a l’avoir utilisé est Ronnie Coleman, 8 fois champion du monde de culturisme, 1m80 pour 138kg en compétition.

Ronnie Coleman

La substance est bannie dans de nombreux pays à cause de sa propension à créer des tumeurs chez l’être humain. Aujourd’hui, les bodybuilders professionnels comme Chris Bumstead désavouent publiquement la substance car trop dangereuse.

Biologie et effets secondaires

La Trenbolone partage de nombreux points commun avec le Dianabol. La molécule est simplement beaucoup plus puissante. Ceci amène à des effets secondaires supplémentaires comme une forte diminution du cortisol. Dans le milieu médical, elle est utilisé en micro-dosage pour combattre des atrophie musculaire grave, des pertes d’azotes et parfois de l’anémie.

La molécule augmente de manière très importante la production de globule rouge ce qui peut amener temporairement à une meilleur oxygénation des tissus. Sous cette optique, la molécule est utilisée encore aujourd’hui sous certains conditions médicales même si cela est sujet à controverse comme nous le verrons plus bas. Qui dit plus d’hémoglobine dit plus de bilirubine (le produit de la dégradation de l’hémoglobine). Le taux de ce déchet métabolique peut augmenter d’un facteur 50 dans le sang ce qui peut provoquer une jaunisse sanguine, une cholestase (la bile produite par le foie est réduite ou bloqué), une hépatite et détruire les reins. Carré d’as, qui dit mieux ?

Dans un article publié dans Nature en 2020, des chercheurs se sont rendus compte que la Trenbolone inhibent la respiration mitochondriale des cellules, ce qui conduit à presque toutes les maladies métaboliques imaginable, le cancer en tête de peloton. Pour les plus férus d’entre vous, voici un schéma récapitulatif du mécanisme d’action de la Trenbolone dans la mitochondrie issu de l’article en question.

Source: Agriesti, F., Tataranni, T., Pacelli, C., Scrima, R., Laurenzana, I., Ruggieri, V., … & Piccoli, C. (2020). Nandrolone induces a stem cell-like phenotype in human hepatocarcinoma-derived cell line inhibiting mitochondrial respiratory activity. Scientific Reports, 10(1), 2287.

Cet article remet fortement en question l’utilisation de la substance dans un cadre médical car même à des micro-doses contrôlées, la Trenbolone reste trop dangereuse pour la santé sur le moyen et long terme.

La Cardarine

La Cardarine est un peptide connu sous le nom de GW501516 et c’est également un SARMS. Il est vendu sous le nom d’Endurobol ou encore de pilule de l’exercice.

Histoire et biologie entremêlée

Depuis les années 80 jusqu’à aujourd’hui, de nombreux laboratoires dans le monde cherchent à développer une molécule pouvant enrayer les maladies métaboliques comme l’obésité, ou tout du moins aider celui ou celle qui prend la substance, à guérir plus vite. En 1990, le géant pharmaceutique GlaxoSmithKline et Ligan Pharmaceuticals réussissent à synthétiser la cardarine : un agoniste des récepteur PPAR gamma. Qu’est-ce que c’est que ce charabia ?

PPAR signifie Peroxisome Proliferator Activated Receptors. Il en existe trois formes : alpha, beta et gamma. Chaque a plusieurs variétés possible mais on s’en fiche. Celle qui nous intéresse, c’est PPAR gamma. Que fait-elle ? Cette protéine sert à deux choses : elles servent de récepteur aux acides gras à la surface de la membrane nucléaire de vos cellules. Lorsque cela se produit, de nombreux gènes peuvent alors s’activer sous son impulsion : des gènes pour la différentiation dans les adipocytes (adipogenèse), des gènes pour la prolifération de peroxysomes (des organites de la cellule dont on reparlera plus tard), des gènes responsables de la production de protéine de signal de l’inflammation (donc en un sens des gènes pro-inflammatoire).

La seconde chose que fait les PPAR gamma est la modulation de l’activité métabolique des peroxysomes. C’est quoi ça ? Ce sont des petites vésicules dans vos cellules responsables de la Beta-oxydation (c’est le second centre pour cela après les mitochondries). L’une de leur fonction est de réduire le peroxyde de dioxygène H202 (c’est un radicaux libre ou ROS en anglais) en eau. Egalement, ces vésicules accueillent en elle la carnitine (un acide aminé dérivé de la méthionine) dont le rôle est d’activer les échanges métaboliques entre le peroxysome et la mitochondrie pour harmoniser l’utilisation du gras dans la cellule.

Les peroxysomes ont encore d’autres fonctions mais je ne vais pas vous tuer avec ça. Gardez simplement à l’idée que ces vésicules ont un rôle essentiel à jouer dans la cellule pour l’utilisation des acides gras et que ces vésicules s’activent en fonction de PPAR gamma.

Chez les diabétiques, chez les obèses, chez les personnes souffrant de maladie métabolique, PPAR gamma n’est pas activé correctement (pour beaucoup de raisons compliqués que je ne vais pas détailler mais pour faire court, l’une des raisons principales vient du fait que ces personnes là n’ont pas assez de mitochondries et que leurs gènes responsables de la modulation des activités du glycogènes sont complètement pétés).

chat qui mange plus que de raison

Les chercheurs se sont dit : “Tiens ! Et si on trouvait une protéine pour relancer l’activité de PPAR gamma chez les patients ? Mais en voilà une idée qu’elle est bonne ! Je finis mon café et on s’y met”. La Cardarine est né.

Malheureusement, la complexité métabolique des cellules fait que lorsqu’on module quelque chose d’aussi fondamental que PPAR gamma, on ne sait pas ce qu’on modifie ailleurs. La bio-chimie à ce niveau là c’est comme résoudre un Rubik’s Cube 10 par 10 à 7 face sachant que le Rubik’s Cube répond et s’autorégule à chacun de vos mouvements. C’est la raison pour laquelle on a pas encore trouvé de pilule miracle contre le cancer ou la vieillisse. La complexité du problème est immense et probablement non solvable mais faudrait poser la question à des chercheurs en informatique théorique. Bref.

Tout ça pour dire que les chercheurs se sont rendus compte en 2007, en faisant prendre à des souris de la Cardarine, que le nombre de tumeurs augmentaient de manière exponentielle dans ces petits animaux. Les recherches furent abandonné mais ce n’est pas la fin de l’histoire pour ce SARMS. Certes les bestioles mourraient rapidement du cancer mais elle voyait leur endurance presque doubler sur des efforts d’épuisement. En effet, à haut dose, la cardarine va augmenter votre beta-oxydation de manière considérable ce qui va pousser vos mitochondries à sucer la moindre goutte d’acide gras dans le système. Mais une mitochondrie qui tourne à plein régime, c’est aussi une mitochondrie qui produit un max de ROS, bien au delà de ce que la cellule est capable d’encaisser. Ce qui conduit à la mort cellulaire ou à la tumeur.

Du coup la Cardarine s’est construit une nouvelle vie sur le marché noire. A mon plus grand regret, on voit à présent sur le Youtube français des gens faisant la promotion des SARMS et notamment de la Cardarine, en les parant de toutes les vertus. Ces Youtubeurs n’ont visiblement pas connaissance des mécanismes cellulaires de fond sur ces substances donc évitez de suivre leur conseil.

Pour conclure, sachez qu’aujourd’hui, on ne sait toujours pas exactement comment la Cardarine provoque la stimulation des tumeurs. Ceci dit, l’agence mondiale anti-dopage a interdit de procéder à des expériences sur les humains pour aboutir à une conclusion scientifique.

Nota Bene sur les tests en laboratoire sur les souris

Je ne discuterai pas de la problématique éthique. Sachez juste que les rongeurs sont des animaux beaucoup plus résistant et résilient que l’être humain lorsqu’ils sont exposés à une substance toxique. Donc si les rongeurs sont étalés au sol par des tumeurs après la prise d’une substance, les chances pour que l’humain y survive sont nulles. Bien sûr, la dose fait le poison mais les tests sur les rongeurs en laboratoire servent à dégrossir la toxicité de certaines substances pour nos petits corps fragiles de chimpanzé sédentaire fan de Netflix.

Généralités sur les stéroïdes anabolisants et cancer

Les stéroïdes anabolisants sont très nombreux. Il existe trois grandes familles : les dérivés de la DHT (terme abordé dans le Podcast), les dévirés de la Testostérone et les dérivés de la Nandrolone, une molécule très puissante que le corps produit dans des quantités infimes et qui sert d’intermédiaire métabolique entre la la Testo et la DHT. Voilà un petit tableau du podcast qui vous donne une idée de la diversité des molécules existantes :

arbre des familles des stéroïdes

Ce qui va différencier une molécule d’une autre est son pouvoir androgène, c’est à dire sa capacité à activer la synthèse protéique dans les muscles, ainsi que son aromatisation potentiel, c’est à dire la proportion de la substance qui sera transformé en œstradiol (hormone dite “féminine”) ce qui peut amener à des risques plus ou moins sévère de gynécomastie.

L’un des mécanismes exacts des stéroïdes (peu importe sa nature) dans la cellule est le suivant : le stéroïde est capté par un récepteur membranaire qui l’emmène jusqu’au noyau. Là, il trouve les morceaux d’ADN qui codent pour les IGF-1 (Insulin Growth Factor), qui sont des récepteurs membranaires pour capter l’insuline. De là, les usines de la cellule qui fabriquent les protéines, les ribosomes, vont se mettre à construire pleins d’IGF-1, donc l’insuline va être captée par la cellule. Or l’insuline permet au glucose de rentrer dans la cellule. Donc cette dernière va avoir à sa disposition beaucoup plus d’énergie pour fabriquer des trucs. La cellule entre en surrégime. Voilà un schéma pas trop compliqué tiré d’un article qui résume ce qui se passe lorsque on fait de la muscu ainsi que d’autres voies métaboliques possibles :

lien entre activité physique, testo, GH, IGF-1 et synthèse protéine

Source: Gharahdaghi, N., Phillips, B. E., Szewczyk, N. J., Smith, K., Wilkinson, D. J., & Atherton, P. J. (2021). Links between testosterone, oestrogen, and the growth hormone/insulin-like growth factor axis and resistance exercise muscle adaptations. Frontiers in Physiology, 11, 621226.

Parmis les stéroïdes, certaines molécules vont créer beaucoup de rétention d’eau, d’autre ne seront que peu aromatisé en oestradiol. Le jeu des bodybuilders ou de certains médecins du sport peu scrupuleux sera par exemple de cumuler plusieurs produits (on parle de stack) pour essayer de minimiser les effets indésirables des uns avec les effets positifs des autres.

Ultimement, ces produits amènent les cellules dans des conditions “supra-physiologique”, autrement dit, en surrégime. En condition normale, une cellule cherche à trouver un équilibre entre la production de protéine qu’on lui demande (pour sa propre survie ou pour d’autres cellules) et ses mécanismes de réparation. Ces derniers s’activent dans une cellule lorsque celle-ci est en état de dépravation énergétique (via un truc qui s’appelle l’AMPK). A l’inverse, lorsqu’il y a profusion de nutriment, la cellule produit un max de protéines (voie métabolique de mTORC1 et C2). Les stéroïdes font pencher violemment la balance envers la production, ce qui empêche la cellule de se régénérer. Une cellule qui ne peut pas se réparer c’est une cellule qui va vieillir de manière accélérée et/ou muter et/ou se transformer en cellule cancéreuse. Voilà le risque de la prise de ces substances.

Si vous souhaitez avoir une compréhension plus fine de ces mécanismes en lien avec l’AMPK et mTOR, j’ai donné un webinaire introductif sur le sujet, dans le cadre de l’Elite Training Symposium de Nevers 2024. Voici le lien ci-dessous :

Probabilité conditionnelle sur la prise de produit et les risques associés

Je n’arrête pas de dire depuis le début que prendre des substances dopantes augmente les risques de cancer. Prenons le temps deux minutes pour poser les choses et calculer de manière implacable la probabilité de choper le cancer ou une maladie lié à la prise de ces substances interdites sachant que l’on utilise ces substances sur une durée de temps significativement longue (disons un an au moins).

Pour ceux qui on du mal avec les maths, vous pouvez aller voir directement le résultat final. Pour les autres, je vais simplement utiliser le théorème de Bayes qui date de 1763, c’est simplement la formule des probabilité conditionnelle telle qu’elle enseigné au lycée. Je vais également utiliser la formule des probabilités totales (pareil, rien de méchant). Commençons par poser les choses.

vous aimez les math n'est ce pas ?

Je choisi comme population de référence les sportifs qui s’entraînent régulièrement car prendre la population générale ici n’aurait aucun sens.

J’appelle l’évènement M : attraper une maladie mortelle comme le cancer

J’appelle l’évènement M barre : ne pas attraper une maladie mortelle comme le cancer

M barre est l’évènement contraire à M.

J’appelle l’évènement D : utilisation trop prolongé de substance dopante interdite par l’AMA (comme par exemple les stéroïdes)

Je cherche à calculer P(M/D), soit en bon français “la proba que j’ai d’attraper une maladie mortelle comme le cancer sachant que j’ai utilisé de manière trop prolongé une substance dopante”.

Pour info, dans P(M/D), le “/” signifie “sachant que”.

Les théorèmes de mathématique que j’ai invoqué précédemment me dise que la proba s’écrit comme suit:

P(M/D) =P(D/M) x P(M) / P(D) avec P(D) = P(D/M) x P(M) + P(D/M barre) x P(M barre)

Pour faire le calcul qui nous intéresse, il nous faut quatre données : P(M), P(M barre), P(D/M) et P(D/M barre).

En France, la proba de choper un cancer est de 50% pour les hommes et 37% pour les femmes. Soyons gentil et disons 37% de chance pour tout le monde car, après tout, notre population est sportive. Donc P(M) = 37% et P(M barre) = 63% puisque M barre est l’évènement contraire.

Ensuite, il nous faut estimer P(D/M) soit la probabilité d’avoir utilisé une substance dopante sachant que l’on a le cancer. Parmi la population disons sportive en France qui a chopé un cancer, une proportion infime a utilisé des produits dopants, disons 5%. Je n’ai pas d’information exacte sur le sujet. Si je prends la population américaine, on sait que 5% des ados (tout sexe confondu) utilisent des stéroïdes ou des SARMS en salle de sport et que ce pourcentage est au moins doublé chez les adultes. Donc je prend 5% comme chiffre pour les athlètes français. Si vous n’êtes pas d’accord, rien ne vous empêche de prendre un autre chiffre 🙂

Donc P(D/M) = 5%

Ensuite, il nous faut estimer P(D/M barre), soit la probabilité d’avoir utilisé une substance sachant que l’on est passé entre les gouttes et qu’aucun cancer ne nous a touché. Autrement dit, on fait partie de cette infime proportion d’athlète sur lesquelles les produits n’ont pas d’effet négatif pour la santé, ou pratiquement pas. Cela existe. Il y a des gens qui répondent très bien aux produits, mais c’est extrêmement rare. là encore, soyons gentil et disons qu’un athlète sur 100 s’en sort bien (c’est vraiment très gentil).

Donc P(D/M barre) = 1%

Je reprend mon équation de départ et je calcul P(M/D).

P(M/D) = (5% x 37%) / (5% x 37% + 1% x 63%) = 74.6%

Donc, en prenant des substances, et en étant très gentil avec l’épidémiologie et les statistiques, on passe d’un risque de 37% de chaque de choper le cancer à environ 75% de chance. Donc le risque est doublé.

Enfin, j’aimerais ajouter que la prise de produit ne rendent pas les entraînements moins durs ni la vie plus facile. Voici pour conclure les mots de Charles Caleb Colton, auteur du début du XIXième :

“Le plus pauvre n’échangerait pas santé pour de l’argent, mais le plus riche donnerait tout son argent pour la santé.”

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