Avez-vous entendu des termes tels que Log-Log, Dmax, ou OBLA lorsque vous parlez de l’interprétation du seuil de lactate ? Dans cet article, je vais vous présenter les différentes méthodes existantes pour trouver le seuil lactique lors d’un test par palier avec prise de lactate. Les nombreuses méthodes d’interprétation du seuil de lactate peuvent sembler déroutantes au début, et c’est parce qu’elles le sont ! Je vais essayer de leur donner un sens et de partager avec vous les méthodes d’interprétation que j’utilise personnellement.

Tout d’abord, rappelons que nous voulons généralement déterminer deux seuils lactiques. Nous les appellerons “Seuil 1” et “Seuil 2”. Chaque méthode d’interprétation vise l’un d’entre eux. C’est pourquoi je vais séparer l’article en deux sections. Dans la première section, nous nous concentrerons sur la détermination du seuil de lactate 1. Dans la deuxième section, nous apprendrons à déterminer le seuil de lactate 2.

Pour mieux illustrer les différentes méthodes d’interprétation, je vais utiliser des données de lactate que j’ai collecté moi-même il y a quelque temps en utilisant mon Protocole 41.

Interprétation du seuil de lactate 1

L’objectif de cette section est de trouver le SL1 ou seuil de lactate 1. Le seuil lactique 1 marque la transition entre un état d’équilibre cellulaire/musculaire et un état d’équilibre systémique. Nous pouvons utiliser le terme “domaine d’intensité” pour chaque état. En dessous du SL1, c’est le domaine modéré. Au-dessus de SL1, c’est le domaine élevé.

Nous pouvons utiliser plusieurs méthodes d’interprétation du seuil de lactate pour trouver le SL1. Les plus courantes sont appelées Log-log, OBLA, Bsln+, LTP, ou encore LTratio. Nous allons maintenant examiner chacune d’entre elles de plus près.

Méthode Log-Log pour trouver SL1

Lorsque nous utilisons la méthode Log-log, nous traçons la réponse du lactate en fonction de l’intensité sur une échelle logarithmique (c’est-à-dire le logarithme du lactate par rapport à l’intensité). Le tracé est ensuite divisé en deux segments. Grâce à une régression segmentée, nous obtenons un point de rupture ou d’inflection. L’intensité d’effort à laquelle le point de rupture se produit est alors considérée comme Log-log (Beaver et al., 1985) et définie comme le premier seuil de lactate. Attention : dans certains cas, cette méthode peut nécessiter une double vérification par inspection visuelle.

Interprétation du SL1 par la méthode OBLA

OBLA signifie Onset of Blood Lactate Accumulation (début de l’accumulation du lactate sanguin). Dans cette méthode d’interprétation, nous utilisons des valeurs fixes de lactate sanguin pour déterminer les seuils. Nous ajustons la courbe de lactate en utilisant une courbe de régression polynomiale de 3e degré. En utilisant cette méthode, nous pouvons trouver à la fois le SL1 et le SL2. Les physiologistes et les entraîneurs ont parfois utilisé l’OBLA à 2 mmol/L pour le SL1 et l’OBLA à 4 mmol/L pour le SL2. Bien que ces méthodes d’interprétation fonctionnent pour certains athlètes, je déconseille généralement d’utiliser des valeurs de lactate fixes pour trouver les seuils lactiques.

Plus de ressources sur cette méthode d’interprétation du seuil de lactate :

Kindermann et al. (1979), The significance of the aerobic-anaerobic transition for the determination of work load intensities during endurance training

Heck et al. (1985), Justification of the 4-mmol/l lactate threshold

Skinner et al. (2013), The Transition from Aerobic to Anaerobic Metabolism

Trouver le seuil de lactate 1 par la méthode Bsln+

Dans cette méthode, nous utilisons le lactate de base (au repos) comme point de référence. À partir de là, nous recherchons l’intensité à laquelle le lactate augmente de 0,5, 1 ou 1,5 mmol/L au-dessus de cette valeur de base. Comme nous l’avons vu ci-dessus, nous ajustons généralement la courbe de lactate en utilisant une courbe de régression polynomiale du 3ème degré.

Par expérience personnelle, je peux dire que le lactate au repos est souvent très différent des valeurs que nous mesurons à faible intensité. Chez les personnes entraînées, je constate généralement une baisse du lactate entre les valeurs au repos (avant le test) et les premiers échantillons durant le test. Dans les cas où la valeur au repos est significativement plus élevée que les valeurs actives à faible intensité, j’aime utiliser ces valeurs actives comme base de référence pour mon interprétation.

Zoladz et al. (1995), Non-linear relationship between O2 uptake and power output at high intensities of exercise in humans

Interprétation du seuil de lactate à l’aide du Lactate Turning Point 1 (LTP1)

Dans cette méthode, nous divisons la réponse du lactate en trois segments. Cela donne deux points d’inflection. Pour le seuil de lactate 1, on regarde le premier point de rupture.

Ressources supplémentaires concernant le LTP1 :

Pokan et al. (1997), Left ventricular function in response to the transition from aerobic to anaerobic metabolism

La méthode du “Lactate Ratio” pour le SL1

La méthode du Lactate Ratio tente de décrire le début de l’accumulation de lactate dans le sang en traçant l’intensité en fonction du rapport lactate/intensité. Nous prenons ensuite le point le plus bas de cette courbe comme seuil de lactate 1.

Seuil de lactate 1 : Quelle interprétation du seuil de lactate est correcte ?

Si nous examinons les méthodes que nous avons utilisées jusqu’à présent, elles donnent lieu à un certain nombre d’interprétations différentes. Mais comment pouvons-nous décider laquelle est correcte ? Nous pouvons utiliser un logiciel gratuit comme ExPhysLab.com pour voir ces différentes interprétations visuellement.

Méthode	Intensité	Lactate	Fréqence Cardiaque
Log-log	158	1.3	134
OBLA 2.0	188.8	2	144
OBLA 2.5	204.5	2.5	149
Bsln + 0.5	127.1	0.9	123
Bsln + 1.0	163.7	1.4	135
Bsln + 1.5	185.3	1.9	143
LTP1	196.5	2.2	146
LTratio	143.2	0.8	129

D’après ces données et les différentes méthodes d’interprétation utilisées, le seuil de lactate 1 se situe quelque part entre 127 et 204 watts. Cela n’est pas très utile. Afin d’optimiser l’entraînement, nous avons besoin de valeurs plus concrètes qu’une fourchette de 77w.

Trouver la bonne interprétation du seuil de lactate pour vous

Sur la base de mes données de test, de mes données d’entraînement et de ma perception de l’effort, je placerais mon premier seuil autour de 160 watts. Cela correspond bien au moment où je commence à ressentir une tension dans les jambes et dans ma respiration (bien que moins importante). Cela correspond également à l’idée de la ligne de base (active, pas pré-test) + 0,5 mmol/L que je trouve intéressante. Dès que le lactate commence à s’accumuler dans le sang, moins de graisses sont oxydées. Nous produisons plus d’hormones de stress. L’état interne change.

Avec ces informations, je peux ensuite mieux individualiser mon entraînement. Je sais quelles intensités utiliser en fonction du stimulus que je souhaite appliquer. Cela dit, il n’existe pas de méthode d’interprétation parfaite. Nous devons tous comprendre les forces et les faiblesses des différentes méthodes d’interprétation. Certaines méthodes se prêtent mieux à un protocole de test spécifique (durée, nombre d’étapes, etc.). En fin de compte, nous devons nous concentrer sur l’utilisation de méthodes qui correspondent à notre façon de tester et qui nous aident à améliorer nos plans d’entraînement et à mieux suivre la condition physique de nos athlètes.

Maintenant que nous avons passé en revue les différentes interprétations du SL1, examinons le deuxième seuil de lactate.

Interprétation du seuil de lactate 2

Le seuil de lactate 2 marque la frontière (ou la transition) entre un état d’équilibre systémique et une perte de cet équilibre interne. Dans le jargon scientifique, nous dirions que nous passons du domaine d’intensité élevé au domaine de l’intensité sévère. Dans le domaine de l’intensité sévère, nous ne sommes plus capables de gérer les différents sous-produits métaboliques. Nous avons dépassé notre capacité maximale de livraison d’oxygène. Cela signifie que nous allons rapidement tendre vers la Vo2max et l’échec de la tâche si nous maintenons l’intensité suffisamment longtemps.

Le SL2 est un paramètre important car elle nous aide à déterminer où se produit ce changement interne. Il convient de noter que la transition n’est pas exacte. Un excellent article a récemment mis en évidence la nature complexe de ce deuxième seuil.

Nous disposons de différentes méthodes d’interprétation pour trouver le SL2 à partir des données recueillies lors d’un test de lactate. Il s’agit notamment de la méthode OBLA, de la méthode Dmax et de la méthode LTP. Examinons-les un peu plus en détail.

OBLA & LTP pour trouver le seuil de lactate 2

Nous avons déjà examiné ces deux méthodes pour déterminer le SL1. Pour trouver le SL2 en utilisant la méthode OBLA, une valeur fixe de 4 mmol/L est couramment utilisée. Comme je l’ai mentionné précédemment, je ne suis pas très favorable aux valeurs fixes de lactate pour les seuils en général. Jan Olbrecht a mené des travaux très intéressants en étudiant les vitesses de nage à 4 mmol/L avec ses athlètes. Il a obtenu des résultats incroyables avec ces méthodes. Si vous souhaitez en savoir plus, il les décrit bien dans son livre The Science of Winning.

Si nous examinons la méthode LTP en ce qui concerne le deuxième seuil de lactate, nous devons considérer le deuxième point de rupture comme illustré ci-dessous.

Maintenant que nous avons examiné les méthodes OBLA et LTP, nous pouvons nous pencher sur la méthode Dmax et ses variantes.

La méthode d’interprétation Dmax a été décrite pour la première fois en 1992 par Cheng et al. En utilisant cette approche, nous trouvons le second seuil de lactate en regardant l’intensité de l’exercice qui “donne la distance perpendiculaire maximale à la ligne droite entre le premier et le dernier point de données”. Voir la représentation visuelle ci-dessous :

De multiples variations de cette méthode Dmax existent maintenant. La plus populaire est probablement la méthode Dmax modifiée citée par Bishop et al en 1998. Dans cette méthode, nous utilisons le point qui précède la première augmentation du lactate au-dessus de 0,4 mmol/L au lieu du premier point de données. Voir le visuel ci-dessous :

De plus, nous pouvons également utiliser la Dmax exponentielle, la Dmax modifiée log-log ou la Dmax exponentielle log-log. Toutes ces méthodes d’interprétation sont disponibles sur ExPhysLab.com.

Seuil du lactate 2 : Trouver la bonne méthode d’interprétation

Nous pouvons examiner les données d’ExPhysLab.com pour comparer les différentes méthodes d’interprétation :

Méthode	Intensité	Lactate	Fréquence Cardiaque
OBLA 3.0	216.7	3	153
OBLA 3.5	227.9	3.5	157
OBLA 4.0	236.9	4	160
Dmax	244.9	4.4	162
ModDmax	275.7	6.6	172
Exp-Dmax	252.6	4.9	165
Log-Poly-ModDmax	266.9	5.9	169
Log-Exp-ModDmax	270.6	6.1	171
LTP2	323.4	11.5	188

Comme nous l’avons vu avec le SL1, trouver le SL2 peut être un défi étant donné le nombre de méthodes d’interprétation existantes. Ces résultats vont de 216 à 323w, soit un écart de plus de 100 watts. D’après mon expérience, j’ai trouvé que la méthode Modified Dmax était la plus précise lorsqu’elle est comparée à ue puissance moyenne (ou vitesse en course à pied) sur un contre la montre de 40 à 60 minutes.

Mais comme je l’ai déjà dit, vous devez comprendre les avantages et les inconvénients de chaque méthode d’interprétation et déterminer celle qui fonctionne le mieux pour votre protocole et votre cadre de planification.

Conclusion

Comme nous l’avons découvert dans cet article, nous pouvons utiliser de nombreuses méthodes différentes pour trouver les seuils de lactate. Les points importants à retenir sont les suivants :

1. Les seuils de lactate ne sont pas absolument EXACTES, mais ils sont UTILES.

2. Chaque méthode d’interprétation a ses forces et ses faiblesses. Apprenez à bien les connaître.

3. Choisissez les bonnes méthodes d’interprétation pour votre protocole et votre situation.

4. Ce qui compte avant tout, c’est la qualité/pertinence de la façon dont vous planifiez votre entraînement sur la base de ces interprétations, et non les interprétations elles-mêmes.

Bon entraînement!

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