Sean: J’ai rencontré Claudia pour la première fois en Mai 2021 à CrossFit Grillen. Quelques temps après, j’ai rejoint son équipe pour l’accompagner sur son travail d’endurance et de respiration.

Ces dernières années, j’ai eu la chance de voir son évolution, d’abord comme athlète amateure puis en tant qu’athlète professionnelle dans le sport du CrossFit®.

Dans cet article, je voulais partager un coté de Claudia Gluck dont on ne parle pas souvent: le parcours qui l’a menée vers le CrossFit® de haut niveau et tout ce que cela implique. Son amour pour la compétition et ses victoires mais aussi ses moments difficiles et ses sacrifices.

Parce que le sport de haut niveau, c’est bien plus que des entraînements et des compétitions.

J’espère que cet article inspirera les athlètes de demain à suivre leurs rêves afin de pouvoir les vivre pleinement.

Comment t’est venue l’envie de performer en CrossFit® ?

Claudia: Avant le CrossFit®, je pratiquais la gymnastique rythmique. C’était plutôt à un niveau amateur, mais dès le début de ma pratique, nous avons été initiées à de petites compétitions. C’était comme ça que tu évoluais petit à petit chaque année. Je pense que cela a forgé en moi un esprit de compétition qui s’est développé au fur et à mesure des années.

Après la gymnastique, lors de mon premier entraînement en CrossFit®, j’ai tout de suite voulu progresser encore et encore. Mes coachs faisaient déjà de la compétition et en organisaient aussi au sein de leur box. C’est donc eux qui m’ont poussée à m’inscrire à la compétition de la box.

Ensuite, petit à petit, ils me proposaient d’autres compétitions locales, puis nationales. Je voyais que je pouvais progresser et performer en compétition alors que j’étais en parcours d’études à l’international.

Je dirais que le déclic a été ma première participation aux Semifinals en présentiel (Lowlands Throwdown 2021), où je me suis dit que si je consacrais encore plus de temps à l’entraînement, je pourrais certainement aller plus loin. J’ai donc fini mes études et pris des décisions pour me permettre petit à petit de performer à un niveau plus élevé.

Quels sacrifices as-tu faits pour te dédier à temps plein à l’entraînement ?

J’ai vraiment du mal avec la notion de sacrifices. À mes yeux, je suis en train de construire la vie que je souhaite, et c’est un peu comme vivre un rêve de pouvoir être athlète à temps plein. Certes, cela demande beaucoup de travail, mais je ne vois pas mes choix comme des sacrifices, mais plutôt comme des décisions conscientes pour réaliser mes objectifs.

Il y a bien sûr des moments plus difficiles. Je dois également refuser certains repas de famille ou autres événements sociaux qui pourraient être trop proches d’une échéance pendant la saison.

Mais globalement, j’essaie d’avoir un équilibre entre ma vie d’athlète et ma vie sociale qui me permet de rester heureuse et passionnée, tout en suivant une routine qui me permet de performer au plus haut niveau.

Comment fais-tu pour rester focalisée sur des objectifs qui peuvent prendre plusieurs années à se réaliser ?

Je pense que j’ai grandi avec mes objectifs, et que ce sera toujours le cas. Pour moi, il est important d’avoir une vision à long terme, qui peut évidemment évoluer, mais en parallèle d’avoir plusieurs petits objectifs à court ou moyen terme.

Quand j’ai démarré le CrossFit®, mes études étaient ma priorité numéro un. Mais en même temps, je prenais de plus en plus de plaisir à m’entraîner et à participer à des compétitions. Et je pense que d’avoir ces deux parties de ma vie m’a permis de me concentrer sur le moment présent. Pour mes études, je devais changer d’environnement tous les trimestres (Suisse, Allemagne, Danemark, USA,…), j’ai donc dû développer une grande flexibilité et une bonne gestion de mon temps. Du coup, quand j’étais à l’entraînement, j’étais entièrement focalisée sur ce que je faisais ; et inversement, quand j’étais en cours, je sortais du monde du CrossFit®.

Tout cela pour dire que je n’ai pas démarré le CrossFit® en me disant que j’allais être une athlète des CrossFit Games, mais plutôt que j’ai grandi à travers ma pratique et que j’ai découvert que je pouvais le devenir grâce à un ensemble d’expériences, que ce soit dans le monde du sport ou en dehors.

Quels ont été les moments les plus durs de ta carrière professionnelle jusqu’ici ?

Les Semifinals 2023 à Berlin ont été, pour le moment, le moment le plus difficile de ma carrière. Je me rendais à cette compétition dans le but de décrocher mon premier ticket pour les CrossFit Games (championnat du monde), et cela n’a pas été le cas. J’ai vécu cela comme un gros échec. J’avais enfin fini mes études, commencé à organiser ma vie autour de l’entraînement en travaillant à temps partiel à mon compte.

J’avais commencé à travailler avec un préparateur mental, un coach de course à pied, un agent, et mis en place plein d’autres choses pour me permettre de performer au mieux. Et malgré tout cela, je n’ai pas réussi à réaliser mon objectif.

Comment as-tu fait face à ces moments difficiles dans ta carrière ? Qu’est-ce qui t’a permis de les traverser ?

Après quelques mois difficiles, des remises en question, et une envie encore plus forte de réaliser mes objectifs, c’est d’abord du temps pour moi qui m’a permis de réfléchir et de changer des éléments dans mon environnement. Ensuite, nous avons beaucoup travaillé avec mon préparateur mental pour faire évoluer mon mindset et prendre conscience de la personne que j’étais et que je voulais devenir.

Enfin, c’est ma famille et mes proches qui m’ont beaucoup aidée. Passer du temps avec eux, en dehors du monde du CrossFit®, et savoir que quoi qu’il arrive dans ma carrière, je reste tout aussi importante à leurs yeux.

Quel rôle joue ta famille et tes amis dans ta vie d’athlète professionnelle ?

Mes proches jouent un rôle essentiel dans ma vie. J’ai grandi dans un environnement rempli d’amour et de bienveillance, et j’en suis extrêmement reconnaissante. J’ai toujours été poussée à réaliser ce que je pensais être le mieux pour moi. En même temps, quand je voulais arrêter quelque chose étant plus jeune (comme la gymnastique à un moment, ou mes études à un autre), on m’a appris la persévérance. J’ai compris que j’avais le soutien de ma famille, tant que je finissais ce que j’avais choisi de commencer.

Ensuite, j’ai fait le choix de me consacrer progressivement à la vie d’athlète professionnelle, mais je n’étais dépendante de personne. J’ai continué à travailler en parallèle, jusqu’à ce que je puisse vivre petit à petit du CrossFit®. Dès mes premières compétitions, mes parents ont toujours été présents, et cela, déjà avant en gymnastique. Ils le sont toujours aujourd’hui.

Nous sommes très proches et passons beaucoup de bons moments en famille. D’ailleurs, l’un des moments qui restera gravé sera ma qualification pour mes premiers CrossFit Games à Lyon, où ils ont tous fait le déplacement.

Quels sont les aspects de ta vie d’athlète professionnelle que tu aimes le moins ?

J’aime mon sport et en suis tellement reconnaissante. Toutefois, la partie que j’aime le moins dans ma vie d’athlète est l’inconnu concernant son évolution et les éléments de la saison qui restent parfois peu transparents et inconsistants d’une année à l’autre.

En même temps, c’est super de pouvoir faire partie de cette évolution, mais cela peut être difficile de gérer un ensemble d’inconnus qui font partie intégrante de ce sport. Peut-être que j’ajouterais aussi la gestion des réseaux sociaux, qui peut devenir, à certains moments, préoccupante et demande beaucoup de temps.

Comment gères-tu la pression des réseaux sociaux et des attentes de la part des personnes qui t’entourent ?

Les réseaux sociaux font partie intégrante du métier d’athlète de nos jours. En fait, c’est principalement grâce aux réseaux sociaux que l’on peut en vivre. Je pense qu’il est important de reconnaître leur importance du point de vue de l’image que l’on doit développer, mais en même temps, savoir s’en détacher dans les moments importants.

Je sais que je dois être présente sur les réseaux sociaux et partager mon parcours et ma vie d’athlète, tout en respectant qui je suis et en gardant une partie de ma vie privée en dehors. Enfin, et je pense que la partie la plus difficile est de ne pas tomber dans la comparaison et de ne pas passer trop de temps à se comparer aux autres, et prendre conscience que l’on partage principalement les “highlights” de notre vie.

Qu’est-ce que tu as changé le plus dans ton approche de l’entraînement ces deux dernières années ?

Il y a eu plein de petites évolutions, mais je ne pense pas qu’il y ait eu de changement drastique. Je crois que l’approche de l’entraînement doit s’adapter aux besoins de chacun. Pour moi, après Berlin 2023, j’ai l’impression de m’être de plus en plus impliquée dans la prise de décision concernant mon entraînement.

Nous avons créé une équipe avec Luc, Basile, Max et Sean, et cette collaboration ne cesse d’évoluer. En début de saison, nous nous mettons d’accord sur l’objectif principal, puis nous travaillons ensemble pour nous coordonner sur les phases d’entraînement et continuer à nous améliorer.

Quels sont les 3-5 éléments principaux de ton quotidien qui te permettent de performer au plus haut niveau ?

1. Mon sommeil.
2. Ma routine.
3. L’échange et les retours avec mes coachs.
4. Ma nutrition.
5. La recherche continue de moyens pour améliorer mon quotidien afin de performer au mieux.

Où penses-tu pouvoir encore améliorer ta routine d’entraînement à l’avenir ?

Je suis convaincue que l’on peut toujours améliorer sa routine. Cependant, je sais que je ne peux pas tout changer en même temps. J’essaie donc d’apporter des modifications progressivement, en observant ce qui fonctionne pour moi et en éliminant ce qui est moins efficace, afin de ne pas me surcharger.

Quelle a été ta plus grande réussite sportive jusqu’ici en CrossFit® ?

Ma première qualification aux CrossFit Games lors des French Throwdown 2024 à Lyon.

Qu’est-ce que tu as retiré de cette expérience pour la suite de ton aventure ?

Il est important d’avoir une vision et d’y croire.

Ensuite, c’est le moment présent qui compte. #chaud

Quels conseils donnerais-tu aux jeunes athlètes qui veulent devenir sportifs professionnels ?

Rêvez, rêvez grand, dans le sport, mais aussi en dehors du sport. Il est important d’avoir un équilibre, d’évoluer en tant que personne et pas uniquement en tant que sportif. D’autant plus quand on est très jeune, car la route vers le haut niveau est longue.

Entourez-vous de personnes qui croient en vous, mais aussi qui vous permettent de garder les pieds sur terre et d’avancer petit à petit tout en étant heureux dans votre pratique.

Quels sont les pièges à éviter si l’on souhaite devenir sportif professionnel ?

Le principal piège à mes yeux est de vouloir aller trop vite, ou de se comparer à d’autres athlètes. Chacun est tellement différent, avec un parcours, des besoins, des expériences différents. Il est important de bien se connaître, de s’entourer de personnes qui tiennent vraiment à vous et comprennent votre projet.

En même temps, je pense qu’avoir des objectifs en dehors du sport pour évoluer en tant que personne est également important en grandissant, pour permettre de se déconnecter par moments et profiter de la vie en général, afin de ne pas tomber dans le “burn-out”.

Enfin, je suis partisane de trouver du plaisir dans ce que l’on fait, dans le processus d’entraînement, et de ne pas se prendre trop au sérieux tout en faisant les choses sérieusement et consciencieusement.

credit de l’image principale: Julian Grochowicz

Note: CrossFit® est une marque enregistrée qui appartient à la société CrossFit, LLC, sans lien avec Upside Strength Sarl.